CO-EXISTENCE TROUBLE DU LANGAGE ET DYSPRAXIE

Question de A-J

Bonjour,

Félicitations pour ce site!! Très intéressant et qui promet plus encore!

J’aurais une question concernant une enfant de 7ans qui a un diagnostic de dyspraxie verbale sévère et qui me semble aussi présenter un trouble langagier se caractérisant sur le plan réceptif par une lenteur de traitement de l’information, des difficultés de compréhension des concepts de temps, d’espace et de tous les concepts abstraits (tout doit être présenté visuellement). Sur le plan expressif: en plus des diffiucltés de programmation des sons, phrases incomplètes et difficultés marquées sur le plan de la structure du récit. Est-ce que l’on peut parler de dysphasie et de dyspraxie? ou les difficultés de langage sont liées à la dyspraxie? Merci de me donner vos impressions…
Salutations
A-J M, orthophoniste

Réponse de Line Charron

Bonjour A-J

J’ai pensé publier ta question car très pertinente et je me suis dit que ça pouvais en intéresser d’autres. Oui les diagnostics de dyspraxie verbale et de trouble du langage peuvent co-exister. La dyspraxie verbale peut aussi se retrouver de façon plus isolée de même que le trouble du langage. Il arrive souvent que l’on observe une prédominance de l’un ou de l’autre dans le portrait communicatif de l’enfant c’est-à-dire soit du trouble moteur de la parole (dyspraxie verbale) ou au contraire du trouble du langage. L’important c’est de bien identifier ce qui touché sans tout attribuer à l’une ou l’autre des atteintes. Ceci est notre point de vue à Andréa et moi. Plusieurs auteurs dont Edythe Strand et Amy Meredith vont dans le même sens. Quelques auteurs comme Velleman ont tendance spécifiquement pour le CAS (Childhood Apraxia of Speech- dyspraxie verbale) à voir cela comme un « syndrome » qui affecte différents aspects de la parole et du langage. Dans l’article de Glossa (section parole en développement => dyspraxie), tu pourras peut-être trouver plus d’informations.
Voici le contenu de 2 diapos de ma formation sur ce sujet:

CONCLUSION ORTHOPHONIQUE:
Amy Meredith ajoute:
UN ENFANT EST RAREMENT JUSTE DYSPRAXIQUE
Ne laissez pas le DX de dyspraxie être le seul quand il y a plus!
Ne pas présumer, parce que l’enfant est DYSPRAXIQUE, que tous les autres symptômes sont liés au Diagnostic de dyspraxie (ex. : pauvre conscience phonologique, difficulté lecture, écriture, comportements TEDD etc.)
Soyez clair avec les parents en ce qui concerne TOUS les facteurs contribuant aux déficits langagiers de l’enfant

CONCOMITANCE TROUBLE DU LANGAGE/ DYSPRAXIE:
La dyspraxie verbale peut se retrouver de façon plus isolée ou se retrouver dans des tableaux plus complexes.
La dyspraxie verbale ne fait pas partie des troubles primaires du langage mais peut s’y ajouter
Dans la description des atteintes, il est important de souligner la présence d’une dyspraxie verbale ainsi que son effet sur l’acquisition du langage

J’espère répondre à ta question,
Bye!
line Charron

Livre témoignage de deux familles vivant avec un enfant dyspraxique

Nous avons reçu cette information sur la publication d’un livre exprimant le témoignage de deux familles vivant avec un enfant dyspraxique. À la lecture, nous comprenons qu’il s’agit de dyspraxies motrices n’affectant pas la parole, mais nous avons jugé intéressant de vous partager l’information. alors voici le lien du livre   « dyspraxie quand tu nous parles »

http://dyspraxiequandtunousparles.blogs.midilibre.com/

Article sur des normes d’acquisition des consonnes en français québécois !

The acquisition of consonants in Québécois French: A cross-sectional study of pre-school aged children
Andrea A. N. MacLeod, Ann Sutton, Natacha Trudeau, Elin Thordardottir
International Journal of Speech-Language Pathology, Vol. 0, No. 0 : Pages 1-17

Andréa Macleod a publié en septembre 2010 un article portant sur des Normes d’acquisition des consonnes en français québécois. Vous retrouverez entre autre dans cet article un tableau de l’inventaire consonantique des enfants âgés entre 20 et 53 mois de même que des Normes portant sur le Pourcentage de consonnes correctes (PCC)*,  le « Phonological Mean Length of Utterance » (PMLU)* (Ingram & Ingram, 2002) et sur le « Whole Word Proximity (WWP)* (Ingram & Ingram, 2002) pour cette même tranche d’âge. Les mots du test « Bulle » ont été utilisés pour définir ces normes. Il est donc possible de comparer les niveaux d’acquisitions à partir des tableaux fournis dans l’article. Bonne Lecture!!! Ne vous gênez pas de nous adresser vos questions!
MacLeod, Sutton, Trudeau & Thordardottir (2010) International Journal of Speech Language Pathology

*Pourcentage de consonnes correctes (PCC) (Shriberg et.al., 1997)  :
Une mesure de précision de la production des consonnes qui est corrélée avec l’intelligibilité et qui est sensible au développement

COMMENT LE CALCULER :
Pourcentage de consonnes correctes (PCC-R /révisé) (Shriberg et.al., 1997)

PCC-R = # consonnes correctes (excluant les distorsions) ÷ # total de consonnes x 100
se référer à l’article pour plus d’information.

*Phonological Mean Length of Utterance (PMLU) (Ingram & Ingram, 2002)
Une mesure de la précision de la production des consonnes et de la complexité du mot qui est corrélée avec l’intelligibilité et qui est sensible au développement

COMMENT LE CALCULER :

  • À partir des mots intelligible, identifier la cible (en orthographe et en API)
  • Transcrire la production de l’enfant (avec les erreurs)
  • Compter le nombre de consonnes et voyelles produites
  • Compter le nombre de consonnes produites correctement
  • Additionner ces chiffres pour chaque mot, et faire une moyenne du score pour tous les mots
  • Mettre en perspective avec les scores typiquement observés pour cet âge

*Whole Word Proximity (WWP) (Ingram & Ingram, 2002)
Une mesure de la proximité entre le mot produit par l’enfant et la forme syllabique

COMMENT LE CALCULER :

  • Calculer le PMLU pour la production de l’enfant et pour le mot cible
  • Diviser le score de la production par l’enfant par celui de la cible
  • Additionner ces chiffres pour chaque mot, et faire une moyenne du score pour tous les mots
  • Mettre en perspective avec les scores typiquement observés pour cet âge

Dépliant informatif sur la dyspraxie verbale

Un document explicatif sur la dyspraxie verbale a été réalisé par une équipe d’orthophonistes de l’IRDPQ à l’intention des parents et des familles:  » La dyspraxie verbale: aider et mieux comprendre son enfant ». Il est disponible sur le site de l’IRDPQ: http://www.irdpq.qc.ca/communication/publications/PDF/brochureDyspraxie_2010.pdf

Dyspraxie verbale quelques définitions

Définition actualisée (MacLeod et Charron-2008)                                

La dyspraxie verbale est caractérisée par une difficulté touchant la planification et la programmation des mouvements de la parole et des séquences verbales qui mènent à des erreurs dans la production de la parole et de la prosodie (ASHA, 2007; Love, 2000; Strand, 2004).  • •Ces difficultés sont présentes en l’absence de déficits neuromusculaires, de paralysie ou de faiblesse musculaire (ASHA, 2007; Kaufman, 2006; Love, 2000; Strand, 2004).  Parfois la dyspraxie orale est accompagnée d’une dyspraxie bucco-faciale (Love, 2000).

Position de l’ASHA, définition 2007

Chilhood apraxia of speech (CAS) is a neurological childhood (pediatric) speech sound disorders in wich the precision and de consistency of movements underlying speech are impairedin the absence of neuromuscular deficits (e.: réflexe ou tonus anormal). CAS may occur as a result of known neurological impairement, in association with complex neurobehavioral disorders of known or unknown origin, or as an idiopathic neurogenic speech sound disorders. The core impairment in planning and/or programming spatiotemporal parameters of movements sequences results in errors in speech sound production and prosody. ASHA 2007

Childhood (Developmental) Apraxia of Speech (Strand, 2004)

–Si on utilise le terme « praxie » alors la nature du déficit est nécessairement au niveau de la planification et de la programmation motrice –Difficulté dans la production volontaire de mouvements de la parole en l’absence de paralysie ou de faiblesse de la musculature –Incapacité à séquencer les mouvements de la parole

Childhood Apraxia of Speech (Kaufman, 2006)

Difficulté à exécuter et/ou coordonner/séquencer les mouvements oro-moteurs nécessaires pour produire et combiner des consonnes et des voyelles afin de former des syllabes, des mots et des phrases de façon volontaire

La dyspraxie verbale, article paru dans Glossa.fr

La dyspraxie verbale chez l’enfant : identification, évaluation et intervention
par Line Charron, Andrea A.N. MacLeod

http://www.glossa.fr/
Glossa n° 109 (42-54), 2010

Résumé:

Le but de cet article est de décrire les approches nécessaires à l’identification, l’évaluation et l’intervention auprès de l’enfant présentant une dyspraxie verbale. La dyspraxie verbale est caractérisée par une difficulté touchant la planification et la programmation des mouvements de la parole et des séquences verbales qui mènent à des erreurs dans la production de la parole et la prosodie. Les indicateurs permettant l’identification et le diagnostic différentiel seront abordés. Le développement des approches en dyspraxie verbale a permis d’identifier des façons de faire efficaces améliorant grandement l’évolution de ces enfants. La combinaison d’approches motrices et linguistiques s’avère essentielle dans la rééducation puisque les limites motrices de l’enfant entravent tout son développement langagier. Nous expliquerons la base des principes d’intervention inspirés des théories sur l’apprentissage moteur de Schmidt (1993), de l’approche de stimulation intégrale de Caruso et Strand (1999) et de l’approche hiérarchique de Velleman (2003, 2006).

Glossa n° 109 (42-54), 2010